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La soudure est un art et une science à la fois : elle rassemble la connaissance des matériaux, la maîtrise des procédés et l’habileté manuelle. Pourtant, même parmi les soudeurs expérimentés, des défauts apparaissent fréquemment et peuvent compromettre la tenue mécanique, l’étanchéité ou l’aspect esthétique d’une réalisation. Dans cet article, nous allons explorer de façon conviviale et pragmatique les défauts de soudure les plus courants, comprendre leurs causes profondes et proposer des méthodes de correction claires, étape par étape. Que vous soyez un soudeur débutant souhaitant progresser, un chef d’atelier désireux d’améliorer la qualité ou simplement curieux, cet article vous donnera des repères concrets pour diagnostiquer et remédier aux problèmes.
Avant d’entrer dans le détail des défauts, il est essentiel de garder à l’esprit qu’une grande partie des problèmes peut être évitée en soignant la préparation, le réglage des paramètres et les pratiques de travail. Une soudure correcte naît souvent avant même le premier arc : choix du joint, nettoyage, préchauffage si nécessaire et sélection de l’apport. Nous verrons aussi comment inspecter une soudure de façon systématique afin d’identifier rapidement la nature d’un défaut et d’appliquer la réparation adaptée.
Comprendre la soudure : pourquoi les défauts apparaissent
La soudure implique la fusion locale des métaux et la formation d’une liaison par solidification. Ce processus, bien que routinier, est influencé par de nombreux paramètres : température, vitesse de soudage, composition chimique, présence d’impuretés, type de gaz protecteur et compétence de l’opérateur. Quand l’un de ces paramètres est inadapté, la solidification et l’adhésion entre pièces deviennent imparfaites et donnent naissance aux défauts.
La variabilité des matériaux joue également un rôle majeur. Par exemple, les aciers faiblement alliés réagiront différemment des aciers inoxydables ou de l’aluminium aux mêmes réglages. De plus, le procédé (SMAW, TIG, MIG/MAG, FCAW, soudage à la flamme, etc.) impose ses propres contraintes et symptômes de défauts. Comprendre ces interactions permet de trouver la cause racine d’un défaut et d’appliquer la correction la plus efficace, plutôt que de recourir à des réparations répétitives inefficaces.
Défauts de soudure les plus fréquents

Les défauts que l’on rencontre le plus souvent peuvent être classés selon leur nature : défauts de morphologie (cordon irrégulier, sous-coupure), défauts internes (porosité, inclusions), défauts de fusion (manque de pénétration, manque de fusion), fissures, et déformations. Pour chaque type, je décris l’aspect, les causes habituelles et les actions correctives à entreprendre.
Porosité
La porosité se manifeste par des trous ou des cavités dans le cordon, souvent visibles à la surface ou détectables par contrôle non destructif. Elle affaiblit la section transversale et peut compromettre l’étanchéité.
Les causes courantes sont la contamination (huile, peinture, humidité), la présence d’oxydes sur la surface, un gaz de protection insuffisant ou turbulent, des électrodes humides et des réglages inadaptés (vitesse trop élevée, tension incorrecte). Parfois, la porosité provient d’éléments volatils dans le métal d’apport ou d’une mauvaise préparation des bords.
Pour corriger la porosité : nettoyer soigneusement la zone, sécher les électrodes et les baguettes, augmenter éventuellement le débit ou la couverture du gaz protégeant, réduire la vitesse de soudage pour permettre un meilleur dégazage, et si nécessaire, meuler la zone affectée pour éliminer les cavités puis ressouder. En processus TIG, contrôler la propreté du gaz et de l’électrode de tungstène est primordial.
Fissures
Les fissures sont parmi les défauts les plus graves car elles peuvent entraîner une rupture catastrophique. Elles peuvent être chaudes (à haute température pendant le refroidissement) ou froides (apparaissant après refroidissement).
Les causes incluent des contraintes résiduelles élevées (déformation non contrôlée), des joints mal préparés, des métaux fortement alliés sensibles à la fissuration, un refroidissement trop rapide (absence de préchauffage), ou des concentrations d’impuretés comme le soufre et le phosphore. La présence de contraintes mécaniques externes pendant la soudure favorise aussi l’apparition de fissures.
La correction nécessite souvent d’enlever la fissure (meulage ou perçage au bout), de réduire les contraintes par préchauffage ou détensionnement, d’utiliser des fils d’apport adaptés et des paramètres plus doux (courant réduit, passes multiples intermédiaires pour contrôler le refroidissement). Dans les cas critiques, il faut recourir à une analyse métallurgique et éventuellement remplacer la pièce ou appliquer un traitement thermique post-soudage.
Manque de pénétration
Le manque de pénétration se voit lorsque la soudure ne fusionne pas complètement l’axe du joint, laissant une zone non soudée à l’intérieur. Visuellement, le cordon peut paraître correct en surface mais l’âme de la soudure est déficiente.
Les raisons typiques sont une puissance insuffisante (courant trop faible), un angle d’électrode inapproprié, une préparation de joint inadéquate (racine trop serrée), ou une vitesse excessive. Le manque de pénétration peut également provenir d’un mauvais positionnement de l’arc ou d’un mauvais type d’apport.
Pour corriger cela : augmenter le courant ou diminuer la vitesse, préparer correctement la racine (chanfrein approprié), utiliser des passes d’encoffrage ou de racine adaptées, et s’assurer d’un bon alignement. La réalisation d’une passe de racine correctement réalisée est la clé de la solidité.
Manque de fusion
Le manque de fusion correspond à une absence d’adhésion entre la matière fondue et les bords du joint ou entre passes successives. Il est souvent confondu avec le manque de pénétration mais se distingue par l’absence d’adhérence à la surface d’appui.
Les causes : courant insuffisant, angle inadapté, préparation de surface sale (oxydes, peinture), déplacement de l’arc trop rapide. Dans les procèdes TIG et MIG, une mauvaise polarité ou un gaz de protection contaminé peut aussi en être la cause.
La correction passe par le nettoyage des surfaces, l’augmentation du transfert thermique (plus de courant ou temps d’exposition plus long), l’angle d’électrode correct et, si nécessaire, refaire les passes mal fusionnées après avoir meulé la zone jusqu’au métal sain.
Sous-coupure (sous-dépouille)
La sous-coupure se traduit par un creux le long du bord du cordon, affaiblissant la lèvre. Elle résulte d’une attaque excessive du métal par l’arc au niveau de la base, souvent à cause d’un courant trop élevé ou d’une technique inappropriée.
Les causes incluent un courant trop élevé, un angle d’électrode trop aigu, une vitesse excessive et parfois des électrodes inappropriées. La sous-coupure demande une attention particulière car elle concentre les contraintes.
Pour corriger la sous-coupure : réduire le courant, ajuster l’angle et la vitesse, combler le creux en effectuant une passe d’apport ciblée, et meuler si nécessaire pour lisser le profil. Les techniques comme les passes en angle et la réduction progressive du courant peuvent aider à éviter ce phénomène.
Cratères et retassures
Les cratères sont des dépressions apparues à la fin d’une passe, dues à la solidification incomplète du bain ou à l’arrêt de l’arc sans remplissage. Elles peuvent conduire à des fissures ou être des points de faiblesse.
Les causes : arrêt brutal de l’arc sans compenser, vitesse de refroidissement trop rapide, manque d’apport à la fin de la passe. Pour corriger : remplir le cratère en effectuant une petite surépaisseur de soudure, effectuer une passe d’arrêt progressive (technique de « crater fill ») et contrôler le refroidissement (pré/post-chauffe si nécessaire).
Projections et éclaboussures
Les projections sont communes particulièrement en soudage MIG/MAG et SMAW. Elles salissent la pièce, peuvent générer des inclusions et gâcher l’aspect du cordon.
Elles sont causées par un courant ou une tension inadaptée, une vitesse excessive, un mauvais mode de transfert du dépôt (spray vs globulaire), une polarité ou un gaz incorrect. Pour corriger : ajuster les paramètres (baisser courant, augmenter la tension ou modifier la vitesse), améliorer le réglage du torche, utiliser des fils adaptés et nettoyer les éclaboussures.
Inclusions de scories
Dans les procédés enrobés ou à flux (SMAW, FCAW), des scories peuvent se retrouver incluses dans la soudure. Elles créent des défauts internes qui affaiblissent la liaison.
Les causes sont souvent un brossage insuffisant entre passes, des techniques de déposition rapides ou inadaptées, ou un mauvais angle. La correction : meuler et retirer la scorie visible, nettoyer entre chaque passe, appliquer des passes plus contrôlées et s’assurer d’un hydrométrie adéquate pour les électrodes enrobées.
Déformation et distorsion
La soudure introduit des contraintes thermiques qui entraînent des déformations. Ces déformations peuvent compromettre l’assemblage ou la géométrie finale.
Facteurs : distribution thermique inégale, absence de calage ou de fixation, épaisseurs différentes, nombre et localisation des cordons. Pour limiter et corriger la déformation : planifier l’ordre de soudage (soudage symétrique, passes alternées), utiliser des attaches/clamps, préchauffer ou contrôler le refroidissement, appliquer des contraintes de contreformage (peening) ou des traitements thermiques de détente.
Tableau synthétique des défauts, causes et solutions

| Défaut | Apparence | Causes fréquentes | Actions correctives |
|---|---|---|---|
| Porosité | Trous/cavités | Contamination, gaz insuffisant, électrodes humides | Nettoyer, sécher apport, augmenter protection |
| Fissures | Fractures visibles | Contraintes, refroidissement rapide, impuretés | Enlever fissure, préchauffer, apports adaptés |
| Manque de pénétration | Zone non soudée en racine | Courant faible, vitesse trop élevée, mauvaise préparation | Augmenter courant, chanfreiner, refaire passe |
| Manque de fusion | Adhésion insuffisante | Surface sale, angle inadapté, courant faible | Nettoyer, augmenter énergie, corriger angle |
| Sous-coupure | Creux le long du cordon | Courant trop élevé, angle erroné | Réduire courant, combler la zone |
| Cratères | Dépression en fin de passe | Arrêt brutal de l’arc, refroidissement rapide | Remplir le cratère, technique d’arrêt progressive |
| Projections | Éclaboussures | Paramètres inadaptés, mauvaise polarité | Ajuster paramètres, nettoyer |
| Inclusions de scories | Corps étrangers internes | Mauvais brossage, passes rapides | Nettoyer entre passes, contrôler technique |
| Déformation | Courbures/décalages | Chaleur non maîtrisée, fixation insuffisante | Soudage symétrique, calage, préchauffe |
Diagnostic étape par étape : comment identifier correctement un défaut
Repérer un défaut ne suffit pas : il faut en comprendre l’origine. Voici une méthodologie simple et reproductible pour diagnostiquer.
1) Inspection visuelle. Commencez par un examen attentif du cordon et des zones adjacentes. Recherchez porosité, fissures visibles, sous-coupures, coloration (signe d’oxydation) et projections. La loupe peut aider pour les détails.
2) Nettoyage local. Nettoyez la zone (brosse, meulage léger si nécessaire) pour voir le métal nu. Parfois la peinture, la scorie ou les éclaboussures masquent le défaut réel.
3) Tests non destructifs (NDT). Selon la criticité, utilisez : contrôle par ressuage/penetrant (PT) pour fissures de surface, contrôle magnétoscopique (MT) pour aciers, radiographie (RT) pour défauts internes, ultrasons (UT) pour profondeur et repérage, ou test d’étanchéité pour assemblages pressurisés.
4) Analyse des paramètres. Interrogez l’opérateur et consultez le dossier : procédé, courant, tension, vitesse, type de fil/baguette, gaz, préparation de joint, préchauffage. Comparez avec les bonnes pratiques.
5) Reproduction et essai. Si le défaut est récurrent, reproduisez sur un échantillon en modifiant un paramètre à la fois pour identifier la cause. Cette méthode expérimentale est souvent la plus instructive.
6) Décision sur réparation ou remplacement. Selon la gravité et la fonction, choisissez entre meulage + ressoudage, réparation locale encadrée par NDT, ou remplacement de la pièce.
Paramètres et équipements à contrôler
Pour mieux prévenir et corriger, voici une check-list des éléments à vérifier avant de souder :
- Préparation du joint : chanfreins, jeux, angles, nettoyage.
- État des pièces : absence d’huile, peinture, rouille, calamine.
- Type d’électrode / fil : diamètre, composition, condition (sec).
- Réglages machine : courant, tension, vitesse d’avance du fil, polarité.
- Gaz de protection : type, pureté, débit et position d’arrivée.
- Fixations et maintien : calages, gabarits, brides.
- Conditions ambiantes : vent (dégazage du gaz), humidité, température.
- Compétence opérateur : formation, expérience sur le procédé et le joint.
Contrôler systématiquement ces éléments permet souvent de supprimer 80 % des défauts fréquents.
Procédures de réparation : guide pas à pas
Voici des procédures de réparation simples et efficaces, valables pour la plupart des défauts courants.
Réparation d’une porosité localisée :
- Marquer la zone affectée après inspection et NDT si besoin.
- Meuler jusqu’au métal sain, en élargissant légèrement pour atteindre toute la cavité.
- Nettoyer soigneusement (brosse métallique, solvant si nécessaire).
- Appliquer le préchauffage si la nuance le requiert.
- Ressouder en respectant les paramètres corrects, en couches fines si nécessaire.
- Contrôler (visuel, PT, UT) pour s’assurer de l’absence résiduelle de porosité.
Réparation d’une fissure :
- Tracer la fissure et percer un petit trou à chaque extrémité pour éviter la propagation.
- Meuler en forme de V jusqu’au métal sain pour créer un sillon de pénétration.
- Nettoyer et appliquer préchauffage si requis.
- Effectuer la soudure en passes successives, en maîtrisant le refroidissement.
- Effectuer un traitement thermique de détente si la pièce l’exige.
- Contrôler par NDT pour valider la réparation.
Réparation d’un manque de pénétration :
- Ouvrir la racine si possible (meulage ou réusinage) pour un accès correct.
- Contrôler l’alignement et le jeu du joint.
- Augmenter l’énergie appliquée (courant) et réduire la vitesse pour assurer la pénétration.
- Faire une passe de racine soignée puis compléter avec des passes de remplissage.
- Inspecter par coupe si besoin sur un échantillon ou par NDT.
Bonnes pratiques pour prévenir les défauts

La prévention reste le meilleur levier. Voici des pratiques simples et efficaces :
- Standardiser les procédures opératoires (WPQR, WPS) et les consignes d’atelier.
- Former régulièrement les opérateurs aux techniques et aux variations des paramètres.
- Mettre en place un contrôle qualité en cours de production : inspections visuelles, NDT périodiques.
- Garder un stock sec et tracé des consommables (électrodes, fils, gaz).
- Utiliser des gabarits et fixations pour minimiser les déformations.
- Planifier la séquence de soudage pour équilibrer la chaleur et éviter les déformations.
- Documenter les incidents et appliquer les leçons tirées (retour d’expérience).
Cas pratiques : exemples concrets et solutions appliquées
Exemple 1 — Porosité en MIG sur une tôle d’acier : l’opérateur observait des trous superficiels. Diagnostic : flux d’air dans l’atelier perturbant le gaz, fil stocké dans un local humide. Solution : augmentation du débit gaz, installation d’une protection contre le vent, remplacement du fil contaminé et réglage du courant. Résultat : disparition de la porosité.
Exemple 2 — Fissure sur une bride d’acier allié : fissure de froid apparue après mise en service. Diagnostic : absence de préchauffage et concentration thermique lors de passes successives. Solution : enlever la fissure, préchauffer à la température prescrite, ressouder en passes contrôlées puis traitement de détente. Résultat : robustesse restaurée.
Exemple 3 — Manque de fusion en TIG sur aluminium : la soudure n’adhérait pas à un bord. Diagnostic : oxyde d’aluminium mal éliminé, torche trop distante. Solution : décapage chimique/mécanique, diminution de la distance torche-pièce et réglage du courant. Résultat : fusion parfaite de la lèvre.
Tableau comparatif des méthodes de contrôle non destructif (NDT)
| Méthode | Détecte | Avantages | Limitations |
|---|---|---|---|
| Ressuage (PT) | Fissures de surface | Simple, peu coûteux, sensible | N’alerte pas sur défauts internes |
| Magnétoscopie (MT) | Discontinuités de surface et sous-surface peu profondes (acier) | Rapide, efficace pour l’acier | Ne fonctionne pas pour matériaux non ferromagnétiques |
| Radiographie (RT) | Défauts internes (porosité, inclusion) | Vision interne, standard industriel | Couteux, sécurité radiologique, interprétation |
| Ultrasons (UT) | Défauts internes, mesure d’épaisseur | Très performant, portable | Requires skilled operator, couplant nécessaire |
Sécurité et environnement : aspects à ne pas négliger lors des réparations
La réalisation de réparations ou de contrôles implique des risques : projections, fumées, rayonnements et manipulations d’outils coupants. Portez systématiquement les équipements de protection individuelle adaptés (casque avec filtre, gants, tablier, lunettes). Ventilez suffisamment l’espace de travail et respectez la réglementation sur l’élimination des déchets (scories, métaux, solvants). Enfin, documentez toutes les opérations de réparation dans les dossiers qualité pour traçabilité.
Conseils pour améliorer durablement la qualité
Si vous souhaitez élever le niveau de qualité dans un atelier, commencez par ces actions concrètes : établir des contrôles à chaque étape clé, former et certifier les opérateurs, réaliser des audits réguliers de procédés, et investir dans des équipements de mesure et des consommables de qualité. Encourager la remontée d’information et instaurer des revues d’incidents permet d’éviter la répétition des mêmes défauts.
Ressources et formation
La soudure évolue : nouveaux alliages, procédés automatisés, exigences de conformité. Profitez des ressources techniques (normes ISO, codes AWS/ASME, fiches matériaux) et des centres de formation pour maintenir les compétences. Les essais pratiques et le compagnonnage sont souvent les moyens les plus efficaces pour transmettre les bonnes pratiques.
Conclusion
La maîtrise des défauts de soudure combine diagnostic rigoureux, réglage méthodique des paramètres et pratique appliquée. En comprenant les causes (nettoyage, paramètres, préparation, contraintes thermiques) et en suivant des procédures claires de réparation et de prévention, on réduit significativement les risques de rejets et on améliore la durabilité des assemblages. Adoptez une approche systématique : inspectez, analysez, corrigez et documentez. Cette discipline, alliée à la formation continue et à l’utilisation d’outils adéquats, vous permettra d’obtenir des soudures plus fiables, plus sûres et souvent plus esthétiques.
